Au diable l'avarice ! [feat Christopher]

Il est curieux de voir à quel point on peut tenir à la foi, d'autant plus lorsque l'on fréquente les plus sombres havres du vice. C'est en tout cas la réflexion que se faisait Neftalí à chaque fois qu'il constatait l'omniprésence des croix et autres symboles de l'églises dans les masures servant de planques aux pires raclures de l'île. Assis bien sagement à côté d'un receleur à la sinistre réputation, le jeune homme écoutait l'homme expliquer ses besoins à une bande de gros bras récupéré on-ne-sait-où sur le marché noir. Des types sans foi, ni loi, ni trop de jugeote qui sont prêt à exécuter toute forme de sale boulot tant qu'on les paie. La cible était un établissement ayant eu quelques démêlés avec des individus haut placés du marché noir. Fort heureusement, ce genre d'incidents ne se terminait pas nécessairement dans le sang. En général, les grosses têtes de la criminalité préféraient laisser le soin à certains de leurs subalterne de fournir un petit rappel aux intéressé. Un cambriolage, un petit saccage, ou une prise d'otage contre rançon suffisaient pour que les gens ne fassent plus parler d'eux.

Neftalí n'était pas spécialement intéressé par toutes ces histoire. "Les ennemis d'aujourd'hui seront les partenaires de demain et viendra le jour où ils se poignarderont de nouveaux" avait-il coutume de dire. Le travail était toutefois bien payé et il s'agissait d'une nouvelle occasion de montrer ses talents aux différents malfrats du marché noir. On l'avait envoyé en premier il y a de cela quelques jours afin qu'il repère les lieux, les habitudes du propriétaire, qu'il identifie les éventuels problèmes et sécurité. Maintenant, il était temps qu'il livre le fruit de ses observations aux gros bras qui se chargeraient de l'escapade. À la demande du receleur, il se leva et parla ainsi de longs instants. Une fois ses renseignements livrés, le receleur annonça la fin de l'entrevue. La prochaine se ferait deux jours plus tard, une fois l'opération achevée. Les gros bras s'en allèrent. Le jeune voleur voulu les rejoindre mais une main subtile vint s'enrouler autour de son bras pour le retenir. On l'entraina au fond de la pièce sombre.

Le garçon se laissa faire lorsque le receleur l'entraina doucement pour le caler dos au mur avant de lui faire face. Neftalí et lui travaillaient ensemble depuis un certain temps déjà. L'homme s'appelait John O'Neal. C'était un anglais venu faire affaire dans les caraïbes mais comme tous les malhonnêtes de son genre, il avait échoué à Nassau où il s'épanouissait aujourd'hui tel un lierre venimeux.

-Encore du beau travail Neftalí, comme toujours... marmonna-t'il d'une voix tendre Que ferais-je sans toi ?

-Tant que t'alignes la ferraille, j'ferais mon boulot. répondit le garçon en tentant de rester impassible.

-À ce propos, cher ami... Je crains d'avoir encore une nouvelle chose à te demander. Il jeta un œil autour avant de se pencher jusqu'à ce que son visage ne soit plus qu'à quelques centimètres de celui de Neftalí. Son sourire carnassier et son regard brillant avaient de quoi faire pâlir. Distraitement, il posa une main à l'arrière du cou de l'adolescent avant de reprendre : Cette affaire est assez ennuyeuse à gérer... Mais comme tu dois le savoir, nous sommes surveillés par de hautes personnalités. Je compte bien profiter des cette occasion pour m'attirer des faveurs. J'aurais besoin que tu ailles me chercher... disons, quelque chose de rare, quelque chose qui ait de la valeur et qui ne se trouve pas dans n'importe quel gargote. Est-ce que ce serait dans tes cordes ?

Le garçon voulu répondre mais il sentit la main commencer à caresser son cou. Le frisson que cela généra coupa tout éclat de voix qu'il aurait pu pousser. Ses iris faisaient face aux yeux de son interlocuteur et il comprit ne pas avoir vraiment de réponse, La question du receleur n'en était pas réellement une. La main qui se mouvait autour du cou du jeune escroc et qui caressait sa gorge aussi doucement que du velours pourrait bien devenir une corde rêche et serrée s'il échouait.

Une fois sur que son message était bien passé, l'homme se redressa. Il relâcha le cou du garçon avant de caresser sa joue en murmurant avec émotion :

-Ah, mon cher Neftalí... Je suis fier de voir quel brillant garçon tu es devenu. Tu es promis à un grand avenir dans les affaires mais fais-moi plaisir... et n'oublie jamais que j'ai été le premier à te donner ta chance. Alors, arrange toi comme tu le désires, passe un pacte avec Davy Jones s'il le faut mais j'ai besoin d'un trésor !

C'est sur ces mots que s'acheva l'entrevue. L'adolescent quitta le sinistre repaire et se hâta de retrouver la rassurante atmosphère crasseuse de la rue. Il inspira un grand bol d'air frais avant de commencer à marcher. Il ne savait pas où ses pas le mènerait et il s'en fichait bien. Pour l'instant, le voleur avait besoin de réfléchir. Il devait faire le point sur ce qui venait de se passer et réfléchir à la manière dont il pourrait bien dégoter ce "trésor rare".

Comme à chaque fois qu'il marchait sans but, il finit par arriver dans le quartier du port. Il inspira un long moment avant de relâcher les épaules. Cela ne servait à rien de se torturer l'esprit pour le moment. Le soir venu, Neftalí rejoindrait les quartier riches et se mettrait en quête d'un manoir à fouiller. Pour l'instant, il allait chercher à se détendre un peu parmi les marins... et s'il pouvait en profiter pour glaner quelques tuyaux prometteurs, cela ne serait que mieux !

La claque, spectaculaire, retentit un bon moment dans l'air matinal, blessant plus l'ego de la jeune femme qui la reçu que son visage fragile. Un instant plus tard, justement, ce visage était inspecté par une main douce et amicale, un mélange qui dégouttait la victime puisqu'il s'agissait de la même main qui lui avait affligé le coup.

Mon enfant, il faut apprendre à tenir sa langue, parfois.... Allez, ça ne devrait pas laisser de traces ni faire mal trop longtemps, soyez forte..!

Un sourire tendre et désolé plus tard, Christopher se leva d'un bond de sa position assise sur ses talons et remit ses gants avant d'observer le reste de leur cargo, puis de se diriger sur le pont d'un pas sûr ; Ils arriveraient bientôt à Nassau et non seulement voulait-il être présent pour bien paraître, mais aussi il ne voulait pas que cette ''Pièce'' de son cargo ne fasse trop de bruit...

...Il n'était pas stupide, aussi savait-il clairement que, si cela s'ébruitait, il risquait rivaux et problèmes. Les bijoux de cette sale gamine qui ne connaissait pas sa place était assez pour attirer n'importe quel voleur, alors leur propriétaire, quand même fort jolie - Et d'une virginité intacte - aurait attiré fort trop de problèmes.

Même à Nassaus, la vente ou la rançon de ce type de cargo étaient délicates, il fallait connaitre les bonnes personnes et savoir comment aborder le sujet sans faire de vagues.

Pour l'instant, son attention se posa une fois de plus sur les derniers ajouts à son équipage ; Un drôle de trio, blonds et pâles, grands et d'une musculature féline, ils s'agissait d'un homme et ses deux soeurs qui avaient dit vouloir ''Retourner aux racines de leurs ancêtres''.

S'ils avaient été anglais, il les auraient rembarrés sans trop de questions ni d'hésitation. Seulement voilà ; On ne disaient pas non - Si du moins ''on'' étaient sensés - à une bande de scandinaves qui voulaient, de leur propre admission, se rapprocher de leurs ''Racines Viking''. Si certains n'appréciaient pas leur présence dans cette église flottante, Christopher, lui, s'en réjouissait. Quel meilleur moyen de convertir de pauvres âmes perdues dans des croyances depuis longtemps abandonnés que de les immergés dans la vrai croyance, ici bas?

De plus, ils avaient partagés sa table les trois derniers soirs et le capitaine goûtait avec plaisir leurs conversations ; Il avait découvert entre autre que la multitude de ''Dieux païens'' qui composait les anciennes croyances abandonnés de leur peuple ressemblaient fort simplement aux différents aspects du dieu véritable. Après tout, dieu pouvait être fort et fier comme leur Thor, juste mais parfois colérique comme leur Odin et si leur ''Loki'' l'avait intrigué un long moment, Yrsa, l'une des deux femmes, lui avait fait réaliser quelque chose ; Dieu n'avait-il pas un plan? Un plan qu'il camouflait à tous?

Ce que certains auraient appeler une hérésie, lui il préférait en penser comme d'une expérience qui lui permettrait de mieux comprendre le divin ; Après tout il avait laisser ces ''hérétiques'' battre de nombreux peuples par le passé incluant certains chrétiens. Ignorer ce fait était d'ignorer une possibilité d'apprentissage.

Un hochement de tête et un sourire de la part de Revna, la seconde femme, jumelle d'Yrsa de ce qu'il avait compris, le ramena à la réalité. Répondant du même mouvement et attardant son regard un instant sur Arne, leur frère, il s'approcha de son navigateur un moment à peine avant que Nassau n'entre en vue. Comme à toutes les fois, il prit la barre, vieille habitude que de naviguer lui-même pour entrer et sortir des ports ainsi que dans les tempêtes ou les batailles. C'était le meilleur moyen, selon lui, d'assurer que dieu les protèges.

Ce détail mis à part, rien d'extraordinaire ne vint tinter la procédure devenue routine qu'était amarrage et, bientôt, la Dame des Brumes se reposait de son long voyage en étant inspecté par un charpentier expert en navires à qui Christopher faisait confiance. Il ne vendrait son cargo que le lendemain, son équipage voyant aux préparatifs, donc autant se dégourdir les jambes, se dit-il en s'étirant un instant avant de placer pied à terre...

...Et de voir un petit raton sournois et enjoué qu'il aurait reconnu presque n'importe où. Un soupir et une pensée vers les emmerdes dans lesquelles le dit raton devait s'être glissés plus tard, il pris pas vers celui-ci ; Mieux valait savoir qu'il ne transportait rien pouvant intéresser ce curieux que de laisser le tout à la chance.

Il parlait à un autre marin, comme souvent, et si l'approche d'un homme provenant d'une autre navire n'apportait pas grande confiance, il avait une certaine réputation, même ici, et l'homme, en l’apercevant, fit un simple signe de croix et un salut sommaire dans sa direction avant de reporter son attention sur son interlocuteur.

Christopher, lui, se contenta de se placer derrière l'animal chapardeur avec un petit sourire connaisseur.

Tient, c'est bizarre, ça, je croyais pourtant que c'était les rats, qui traînais dans le coin, pas les ratons chapardeurs...

Certains auraient pu y trouver une attaque camouflée, mais n'importe qui connaissant l'homme auraient tout de suite vu toute la considération amicale que camouflait ses mots et son sourire. Tout comme il savait lui-même que supposé que le jeune était dans des embrouilles n'était pas une insulte à son caractère, mais bien une évidence.

Une seule question reste donc... Dans quel type d'embourbes t'es-tu embourbé cette fois, Neftali..?

HRP:

Nef errait d'un groupe de marins à l'autre. Il désespérait. Il y avait de nombreux hommes figurant parmi les moins recommandables que les mers aient pu porter, des corsaires, des pilleurs, des sanguinaires en quête d'or... Pourtant, aucun d'eux ne semblait particulièrement à la recherche ou en possession d'une quelconque richesse. Tous ne parlaient que de pillages, de maigres récoltes, de nourriture et de boissons... À croire qu'un esprit tordu était venu les adoucir dans leur sommeil. Bien entendu, le jeune escroc ne comptait pas que sur ces vieux loups des océans pour ramener un beau butin mais ils avaient toujours représenté une voie de simplicité en cas de besoin urgent. Lui aimant les trésors et eux cherchant à s'en débarrasser contre assez d'argent pour vivre un peu plus longtemps leur vie de débauche et de plaisirs.

Une heure ou deux passèrent ainsi où le brun s'immisça dans les conversations des matelots, soutirant de "précieux" conseils sur les endroits où aller chercher une bonne chope ou sur la manière d'approcher les catins de Nassau. Quelques fois, il soutirait aussi des bourses aux plus étourdis. C'était sa façon à lui d'apaiser son stress grandissant.

Tandis qu'il songeait à abandonner et à se rapprocher des quartiers riches afin d'y faire un peu de repérage, une voix bien familière se fit entendre dans son dos. Le garçon se retourna pour admirer ce visage amical qu'il n'avait pas vu depuis bien longtemps. En entendant les mots taquins de son interlocuteur, il prit une mine offusquée qui aurait pu paraître convaincante pour n'importe qui ne connaissant pas le vice dans lequel baignait l'âme de l'adolescent.

Un raton chapardeur ? J'mange pas de c'pain là mon père ! Je ne fais que prier et encourager les braves gars à faire le... euh...l'auma... l'aumo.... l'aumone ! Voilà ! Pour les plus pauvres âmes!

Il ponctua sa phrase d'un léger clin d'œil.. Après tout, même si ses poches pensaient à présent un certain poids, il demeurait un pauvre enfant des rues ne pouvant compter que sur lui-même, pas vrai ? En partant de ce postulat, il pouvait légitimement se considérer comme un pauvre ayant besoin de... généreux dons afin de survivre. Enfin, ils n'allaient pas s'étendre sur le sujet en pleine rue. Neftalí ne tenait pas spécialement à ce qu'on lui attache l'étiquette de voleur sur le front. Cela le contraindrait à se tenir loin du port pour se faire oublier et il n'avait pas besoin de ça. Heureusement, le pirate changea rapidement de sujet. Le sourire du bouclé s'effaça pour laisser place à une expression plus sérieuse :

-Ah, pas de quoi s'faire d'mourron l'aminche ! Mais je cherche des bails plus gros. Mieux que d'la ferraille... et toi ? Qu'est-ce qui t'amène ici depuis le temps ? Et si on allait en causer avec une chope ? Ça me fait plaisir, l'aumône a été bonne !

Le brun avait confiance en l'homme. Il savait qu'il n'était pas du genre à se contenter des petits gibiers.... et puis pouvoir s'asseoir un peu ne serait pas de refus pour lui.

HRP:

Au diable l'avarice ! [feat Christopher]

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